Dans quels cas un employeur peut-il engager un détective privé ?

S’il soupçonne un employé de frauder l’assurance-salaire, un employeur peut-il engager un détective pour réaliser une filature ? Quelles sont les limites du droit à la vie privée du travailleur ? Explications.

La fraude par les employés coûte aux entreprises 5 % de leur revenu, selon le rapport 2018 de l’Association of Certified Fraud Examiners. Le recours à un enquêteur privé fait partie des moyens envisageables pour s’attaquer à ce problème.

Si les tribunaux ont statué que cette démarche brime le droit individuel à la vie privée, ils ont cependant déterminé que ce droit n’est pas absolu.

Voici les circonstances et les conditions qui justifient la surveillance par un enquêteur.

Des motifs sérieux

Le bruit court qu’un employé utilise le camion et les outils fournis par l’entreprise pendant ses jours de congé ? Une rumeur comme celle-ci ne suffit pas à justifier le recours à la filature.

Il en va autrement si différents collègues disent l’avoir eux-mêmes vu au volant du véhicule de l’entreprise les week-ends. Tout comme si un travailleur en congé de maladie pour lombalgie publie sur les médias sociaux des photos de lui en train de faire de la planche à neige ou que les symptômes qu’il décrit lors d’un examen médical sont contradictoires. On entre alors dans la zone des motifs raisonnables de soupçonner une fraude.

Une démarche nécessaire et proportionnelle

La filature doit en outre être une solution de dernier recours. « L’employeur doit d’abord avoir exploré d’autres moyens pour obtenir l’information, comme avoir consulté les vidéos recueillies par les caméras de sécurité de l’entreprise ou avoir interrogé l’employé sur son comportement », dit Claude Paul-Hus, directeur général du Bureau de la sécurité privée (BSP), l’organisme québécois de protection du public en matière de sécurité privée.

On veillera aussi à réserver la filature aux cas où l’infraction présumée est grave. C’est ce que le directeur général du BSP appelle le critère de proportionnalité.

Enquêteurs accrédités seulement

Au Québec, le métier d’agent d’investigation – c’est le titre légal du détective privé – est une profession encadrée par la Loi sur la sécurité privée. Pour que l’enquête soit réalisée dans les règles de l’art, mieux vaut retenir les services de l’un des 1 800 détenteurs de permis d’agent d’investigation que compte la province.

On s’assure ainsi d’avoir affaire à un professionnel tenu de respecter les règles de la profession : l’obligation de faire preuve de respect et de s’en tenir à des moyens d’enquête raisonnables de même que l’interdiction de harceler un individu, entre autres.

« Le champ d’action de l’enquêteur privé n’est pas blanc ou noir, résume Claude Paul-Hus. Même dans les lieux publics, il existe une expectative de droit à la vie privée. Comme employeur, il faut donc s’assurer que la démarche d’enquête est justifiable, et la confier à un professionnel qui la mènera avec rigueur. »

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